Le Mont Billiat par
Nifflon d'En Haut
En
parlant avec une connaissance de mon éternel besoin de renouveau en
matière de randonnée et de cette limite que je perçois comme ténue
entre la rando un minimum sportive et le trail, voilà qu'il me
suggère de monter au Mont Billiat en partant de Seytroux. Le Mont
Billiat je voyais plus ou moins sa forme énigmatique, un peu
similaire à celle du Roc d'Enfer, mais malheureusement plus bas et
surtout accessible en voiture jusqu'aux Chalets de Buchille. Ce qui
en fait une cible parfaite pour les promeneurs, ce que j'aime pas
nécessairement rencontrer lors de mes rendez-vous montagnards.
J'avais donc snobbé ce Fameux mont « Biat Bouquet »,
préférant son grand frère de Saint Jean d'Aulp.
Itinéraire
J'emmagasine
donc sans rien dire l'itinéraire proposé, qu'il serait possible de
faire en mode rando-trail.... je me dis que je vais voir au calme si
ça me tente vraiment. De retour à l'appartement, je me pence sur la
carte IGN, et ensuite celle des randos des Portes du Soleil et je
découvre finalement l'itinéraire proposé. Départ du parking des
Culées, sur les Hauteurs de Seytroux, passage au Col de la Balme,
ensuite col de Seytrouset, montée aux Chalets de Nifflon d'en Haut,
traversée vers la Pointe d'Ireuse, descente soit par la forêt soit
par le Pas de l'échelle vers les Chalets de la Buchille, direction
les Chalets de Perthuis et montée au Mont Billiat (1894M). Selon
l'échelle de la carte aller-retour on doit tourner autours des 20KM.
Je le propose à un ami, qui hésite de m'accompagner, 20KM et 1700M
de D+ selon ses calculs c'est de trop... J'entends son argument, mais
en mode rando je sais que pour moi ça passe flex. Adjugé j'y vais
et seule. J'aime être seule en montagne de toute façon, seule avec
mes pensées et mes réflexions, du coup plus ouvertes à mes
sensations et connectée à mes sensations. Lorsque je suis seule en
montagne, je fais souvent de très chouettes rencontres aussi, même
si elles sont éphémères, elles portent toujours des pistes de
réflexions, des visions différentes, des idées qui modifient le
voyage intérieur qu'est le chemin pédestre. Une fois l'itinéraire
arrêté, je dispose de données objectives qui me permettent de
planifier la journée. Je vérifie la météo, on prévoit des orages
localement, à partir de 15H00, je devrai donc partir assez tôt,
pour boucler la boucle raisonnablement tôt aussi. Je choisis aussi
de passer à l'aller par le pas de l'échelle qui est noté comme
passage engagé, ce genre de passage ne me pose pas trop de problèmes
ordinairement, mais c'est le genre d'endroits que j'aime envisager
par temps sec surtout pour une première. Je vérifie les topos sur
internet pour voir des photos du fameux passage mais il est très peu
documenté. Par contre, je tombe sur un itinéraire alternatif,
décrit comme vertigineux, engagé, qui suis toute la crête... ça
m'intéresse mais on verra mon état de forme le lendemain et l'état
du ciel.
Ascension
Du mal à me lever, je commence à fatiguer un peu de mes excursions
en montagne. Je prends le temps de bien manger au matin et je me
prépare un pique nique pour midi. Au moment de doser l'eau je ne
prends qu'une seule bouteille, les chalets de Buchille et du Perthuis
sont des points d'eau potable. J'essaie de randonner plus léger
qu'à la Haute Cîme parce que je me sens fatiguée, je prends quand
même un sweater et un imperméable. Quelques barres de céréales au
cas où... direction Seytroux. Le parking de Culée est très mal
indiqué et je dois me renseigner en chemin. La fin de la route est
pénible pour ma voiture mais ça va j'y arrive. En sortant je vois
un coureur (trailer?) et son chien, et je me dis que c'est sans doute
un bon itinéraire. Il est 9H15 je me mets en route avec l'idée de
garder un bon rythme. Le premier chemin est un chemin forestier,
carrossable, je monte bien, il me mène à une combe où deux trois
chalets viennent casser la monotonie de l'herbe des alpages. C'est un
peu un paysage de carte postale. La vue depuis les chalets est très
belle, même si l'humidité qui monte du Léman couvre tout d'un
voile de vapeur.
J'arrive
au col de la Balme sans incident : tout est parfaitement balisé.
Deux itinéraires sont possibles un passe clairement par la forêt ,
je le choisis parce que je sais qu'il va faire chaud, le soleil tape
bien et toute ombre sera la bienvenue. Ce sentier est assez raide
mais très agréable il serpente entre les sapin et le bruit du vent
dans les aiguilles est vraiment apaisant. J'ai envie de courir mais
avec mon sac à dos de rando ce n'est pas chose aisée. A la sortie
de la forêt je remarque une balise de trail. Je ne suis pas
surprise. Je me dis que je devrai vérifier de quel parcours il
s'agit (parcours 3 oui mais de quelle station?). Après la forêt, le
chemin emprunte les alpages, remplis d'épilobes et de chardons, il y
fait chaud déjà. J'arrive au col de Seytrousset assez rapidement.
Beaucoup plus rapidement que ce qui était annoncé sur le panneau en
tout cas.
Je
sors de la combe et me dirige maintenant vers la Point d'Ireuse, que
j'atteins assez facilement. Depuis Nifflon je me dis que le terrain
devient très dur pour du trail, on est dans des chemins avec des
pierres très saillantes. C'est très pénible pour les chevilles
voir même assez accidentogène. En marchant je sens déjà mes
chevilles qui souffrent. Leur élasticité est mise à rude épreuve.
Pour aimer ce genre de terrain, il faut une foulée très légère ce
qui n'est pas (encore?) mon cas.
A la
pointe d'Ireuse je rencontre un couple, nous conversons un peu et je
leurs demande de me photographier pour au moins avoir un souvenir où
je suis dessus (je déteste les selfies). Le monsieur se prête
gracieusement à l'exercice. Avec le Mont Billiat en toile de fond ça
fait tout de suite plus sérieux. Il s'intéresse à mon itinéraire,
je lui montre sur la carte des Portes du Soleil. Il me demande si je
passe par le pas de l'échelle, je lui explique que oui mais à
l'aller seulement, à cause du risque d'orage. Il me dit alors qu'il
y a un chemin de crêtes, pas toujours rassurant mais beau... ce
n'est pas tombé dans l'oreille d'une sourde. Je lui demande de me le
montrer sur la carte mais il arrive à la même conclusion que moi,
ce n'est pas indiqué sur la carte. C'est la carte IGN simplifiée
des rando des Portes du Soleil, le public cible est la famille plus
ou moins bonne marcheuse. L'itinéraire dont il me parle sort de ce
contexte là. Il me voit bien dedans (pour un fois je n'ai pas qqun
qui doute de me capacités de marcheuse... ouf ça rassure) mais il
me met en garde que le sentier ne sera pas bien marqué parce que peu
de gens l'utilisent et qu'il n'est pas balisé. Bon j'ai jusqu'au pas
de l'Echelle pour y penser. D'un côté, prendre un sentier non
balisé sans carte me semble pas très raisonnable, surtout sur une
ligne de crête avec des a-pics calcaire, d'un autre côté, je
connais le paysage et ça peut être intéressant. Après avoir
discuté dans le désordre, de trail, de la circulation sur
Bruxelles, du Kungsleden trail, de la beauté des paysages et
d'entraînement, je les quitte en les remerciant et surtout en leurs
souhaitant une belle journée.
Mont Billiat dans le fond
Paysages assez contrastés des falaises de calcaire blanc
Aux doux alpages
Je
continue mon chemin en traversant des paysages contrastés, d'une
grande beauté. Je pense que cette région est sous exploitée pour
l'escalade. C'est une pitié mais en même temps elle garde un cachet
assez sauvage. Entre à pic de calcaires et pentes douces à alpage
avec un chalet occasionnel.
A
plusieurs reprise je me dis que c'est une perle de parcours... je suis même très étonnée de ne rencontrer finalement que peu de gens et aucun sur le
parcours itinérant que j'emprunte.
J'arrive enfin au fameux pas de
l'échelle ou du moins à son approche, c'est un peu plus acrobatique
mais ca reste très simple. Très mal balisé en fait parceque arrivé
au début du passage j'aurais du voir des pancartes indiquant le
chemin 'facile' vers les chalets de la Buchille et ce n'est pas le
cas. Ca a peut être été vandalisé ce ne serait pas la première
fois que des panneaux sont retirés. C'est dommage et dans ce cas-ci
un peu dangereux. J'arrive enfin à la fameuse échelle et là je me
dis même que c'est franchement dangereux. Quand je veux évaluer le
danger, je me pose la question, est ce que je me verrais avec
Elizabeth (ma fille) dans ce passage. Et là c'est limite du 'non', j'ai trouvé
un passage pour contourner le moment vraiment vertigineux de descente
vers l'échelle qui, même si il est cablé, ne m'inspire pas
confiance mais la montée sur l'échelle est malaisée, et elle n'a
pas été mise là par hasard, en dessous c'est vertical. La descente
à l'échelle est simple mais vu le vide derrière ça peut
impressionner des enfants ou des personnes sensibles.
En contournant le premier passage j'arrive au dessus de l'échelle
Passage câblé qui me parait vraiment 'bof'
Le fameux passage de l'échelle
Au
bas du passage de l'échelle je devrais retrouver un sentier pour
descendre sur les chalets de la Buchille, mais je ne vois rien. A
peine un sentier qui va tout droit. Je comprends que je m'engage sur
le fameux sentier des crêtes. Je me dis encore une fois que c'est
quand même un peu raide ! Le balisage c'est la base de la rando
familliale... On n'est pas sur un parcours alpin...
Je
suis ce fameux sentier qui est à vrai dire à peine visible dans les
hautes herbes. Je croise une famille, je ne sais pas d'où ils
sortent mais pas des crêtes ils me l'assurent. Bon... le monsieur me
montre un vague là-bas... le sentier vers les Chalets doit
exister... Je continue tout droit sur un sentier qui suit
l'inclinaison de la pente, et qui en plus est invisible depuis mon
mètre 60, il est envahi de plantes qui m'arrivent aux oreilles, je
me fais piquer par des orties sur la lèvre ! Je trébuche
quelques fois, la pente est raide mais herbeuse, je ne pense pas que
je risque ma vie mais ce n'est pas le chemin le plus agréable à
suivre. Il oscille entre pente herbeuses et passages en foret qui
relèvent du labyrinthe. Mais je me dis que tous les chemin mènent à
Rome pour autant qu'on ne s'approche pas trop du bord sinon c'est le
paradis. La chute ferait un bon 500M... pour un saut de l'ange c'en
est un beau. Mais bon le risque est mineur. Je retrouve un sentier
pour continuer vers une autre arrête caillouteuse et herbeuse. Je
pense que c'est le fameux Billiat. Je rencontre deux trailers qui me
détrompent. Le Billiat est deux pics plus loin, je le vois en
descendant un peu. Je leurs demande si ils comptent courir dans ce
sentier horrible, et la surprise ils me disent que le sentier
horrible est celui qui m'attend, parce que c'est une arrête
impressionnante. D'habitude, je ne suis pas très impressionnée par
ce genre de sentier mais bon me voilà prévenue. Je leurs souhaite
une bonne continuation... On verra... arrivée au bout de la mini
descente, je me retrouve en effet devant une belle ligne de crête.
Celle de devant monte ferme... je vois le sentier qui suis le bord de
la falaise... ça va être gazeux mais ca ne me dérange pas. Dans
ces cas là je me concentre et j'évite de laisser aller mon esprit à
des conjectures, je me concentre sur chaque pas, et ça passe tout
seul. Ce genre d'arête au niveau de la mer ne poserait aucune
question; la seule chose qui fait douter c'est l'altitude et l'idée
de l'a-pic de chaque côté qui ferait qu'une chute serait mortelle.
Ici de plus comparé au roc d'Enfer, les pentes sont moins raides et
clairement moins impressionnantes. Les seuls passages un peu tangents
c'est lorsqu'on doit passer par dessus l'arête, mais ça reste tout
à fait faisable en marchant. En passant, sur la première montée je
vois un papillon inhabituel. J'essaie de le photographier mais ce
n'est pas évident, il parait un peu timide.
Je
croise un père et ses deux gamins (on les voit sur la photo) Je me
demande si il sait dans quel genre de chemin il va s'engager. Son
plus jeune doit avoir aux environs de 7 ans, il va être en dessous
du niveau des fleurs... déjà sur l'arête il trébuche
régulièrement. Je me demande quel plaisir il peut avoir à faire
ça, et quelle glorification le père peut avoir. Le Mont Billiat est
facile par la voie ordinaire, des dizaines de gens non qualifiés le
font tous les jours, il n'est pas haut... la gloriole est mince par
rapport aux risque qu'il va faire courir à son enfant. A sept ans
l'équilibre et la vision ne sont pas encore à maturité, il suffit
de voir des enfants qui marchent sur une poutre, à 7 ans on parle
encore d'un équilibre très instable... Le gainage n'est pas encore
acquis (si preuve en était besoin les mini chute du gamin en sont
témoins), je ne dis rien en les croisant j'entends que le gamin
râle, et que le père espère récupérer les chalets de la
Buchille... ça veut dire qu'il va traîner ses deux gamins (en
baskets, donc dans des chaussures dont les semelles glissent sur ce
genre de terrain) tout le long de l'arrête... Je les plains... Peut
être j'aurais du dire quelque chose... J'ai juste pris l'habitude
depuis que j'ai eu une altercation assez violente avec un père qui
assurait son gamin au huit comme si il utilisait un gri gri, de me
dédouaner de toute responsabilité par rapport à ce que je croise
comme ineptie, et ce que je croise c'est une ineptie
LE chemin passe derrière les sapins pour suivre une jolie ligne de crêtes
Début de la crête, ça reste simple sauf aux passages plus rocheux, où on passe d'un côté à l'autre de la crête.
J'arrive
bientôt au sommet du Billiat et je m'arrête pour une pause
déjeuner. Que je fais courte. La montée a pris beaucoup plus
de temps que prévu, et je commence à être à court d'eau. Il me
faudrait arriver au Perthuis le plus tôt possible car il ne me reste
plus qu'une petite gorgée. Pour une fois j'ai vu trop juste. Ensuite
le sommet est envahi de mouches. Le paysage est intéressant mais je
pense l'avoir déjà vu sous une forme ou l'autre trop de fois. Je
pense que le chemin était largement plus marquant que la vue du
sommet.
On
y voit quand même mieux la plaine du Chablais, grenier à grain du
Chablais. Et c'est intéressant.
Je
redescends vers le Perthuis, la descente est largement plus facile, le
passage de fin est chaîné mais la progression dans les rochers en
pente douce est aisée, je dépasse deux groupes de promeneurs et je
me paie même le luxe de récupérer le bâton d'un dame. Elle avait
laissé son sac ouvert et le bâton était tombé beaucoup plus
bas... c'est de la D+ en plus, bon exercice:-)
J'arrive aux Chalets du Perthuis en une dizaine de minutes. Malheureusement, malgré le signe eau potable je ne vois pas de fontaine. Je regarde le Mont Billiat depuis un autre versant et il me parait totalement différent.
J'arrive aux Chalets du Perthuis en une dizaine de minutes. Malheureusement, malgré le signe eau potable je ne vois pas de fontaine. Je regarde le Mont Billiat depuis un autre versant et il me parait totalement différent.
Chalets du Perthuis
Vue complètement différente du Mont Billiat
Je
continue donc rapidement vers les Chalets de la Buchille et là je
suis certaine de trouver de l'eau, on m'a décrit l'endroit, c'est
fréquenté et certains chalets sont habités pendant les vacances.
Je
descends donc par une route qui me parait un boulevard après ce que
j'ai parcouru et en une dizaine de minutes de nouveau j'arrive aux
chalets en question. Je remplis ma bouteille d'eau fraîche et pour
la première fois je m'inquiète de la météo. L'humidité a fait
remonter des cumulus depuis le Léman, et ils amoncellent, je ne
pense pas qu'il pleuve à 15H par contre plus tard dans la soirée on
n'est pas à l'abri d'un orage car le vent se lève et tourne assez
violemment. J'ai largement le temps pour rejoindre ma voiture.
Le Train des Chalets de la Buchille
On
est à présent en plein dans le temps de midi, je souffre de la
chaleur et du soleil qui tape, en effet je ne suis pas très haut et
je sens le soleil brûler ma peau. Je n'ai mis de la crème que ce
matin je commence à la regretter. Je vérifie les panneaux e je
reprends mon chemin qui heureusement est princialement dans la forêt.
Ce chemin est très ludique, il faut suivre les balises jaunes dans
un amas de branches de rocs et de feuilles bien grasses. C'est
amusant mais ça monte ferme. Je bois beaucoup, j'espère ne pas
devoir me rationner par la suite... mais j'arrive à 1500M de D+
cumulée sur la sortie donc ça ne devrait plus être trop long.
Un chemin principalement forestier et très amusant à suivre
J'y
suis enfin... le retour maintenant n'est qu'une répétition du
chemin aller. La pointe d'Ireuse et Nifflon d'en Haut.
De retour à Nifflon
Détail d'une porte de chalet
Une
journée très fatigante et fascinante par la découverte de ce
parcours merveilleux. Un beau parcours comme j'aime avec de
l'inattendu etclairement pas une rando ordinaire...
No comments:
Post a Comment